Alain Souchon parle de Daniel Balavoine (Paroles et Musiques Novembre 1986)

-Balavoine, tu le connaissais bien ?

-Non, un peu seulement. Il avait écrit sur moi quelque chose qui m'avait beaucoup touché, quelque chose de très fort : en effet exactement ce que j'avais envie qu'on dise de moi.
Il avait dit que j'étais habillé normalement, que j'avais un aspect très gentil et que je disais des choses terribles parfois dans mes chansons, comme dans "Le dégoût". Moi j'ai toujours pensé qu'il était beaucoup plus fort d'être rebelle habillé d'une manière courtoise. Alors Daniel Balavoine, il a été déchiqueté en une fraction de seconde, je sais pas ce qu'on peut en dire, c'est trop atroce, et injuste. Et puis il y a l'horreur des médias, les magazines, la télé ; la mort de Balavoine est allée chez tout le monde, d'une manière très forte. Et puis comme tout ça c'est du spectacle, que ce soit la politique, Beyrouth ou la mort d'un chanteur, on passe à autre chose, très
vite. Mais moi j'y pense tout le temps, des fois ça me réveille la nuit, pourtant c'était pas mon ami intime. Si je me tue en voiture demain, on va essayer de guetter mes enfants pour voir la tête qu'ils font en sortant de l'école, s'ils sont tristes, les petits orphelins, et puis au bout d'un moment les gens en auront assez : "bon, Souchon ça suffit, il est mort, et basta..."

-Cet accident relativise aussi terriblement tout ça, non ?

Parce que Balavoine était quand même très présent, il avait une espèce de poids qui était aussi au-delà de la chanson ?

-Mais pour les gens qui l'aimaient il est toujours présent ! Et ce sera long à cicatriser. Il est toujours là dans la tête de ceux qui l'adorent. Il a vendu énormément d'albums, et les gens les écoutent ! Balavoine, il est plus que jamais chez les gens, aujourd'hui.